C'est dans ce village de 5000 âmes, non loin de Montpellier, à l'ouest, que s'écrit l'aventure de Julien Baret. Non loin de là, à Murviel lès Montpellier, avec seulement 2000 habitants, une école maternelle porte le nom de Jeanne Barret. Deux villages méditerranéens, avec des collines recouvertes de garrigues, au climat nettement marqué par un fort ensoleillement de 2700 heures par an (à Paris il est de 1800 heures), et une pluviométrie réduite à 800 millimètres. La vigne y règne en maître sous l'appellation Saint-Georges d'Orques.
L'histoire la plus incroyable est celle de Jeanne Barret (1) la compagne du docteur et botaniste Philibert Commerson qui devint Jean Baret. Le docteur Commerson (1727-1773), s'engage, le premier février 1767 dans l'expédition du comte Louis Antoine Bougainville au départ du port de Rochefort qui va faire le tour du monde, afin de faire des observations sur les trois règnes de la nature dans tous les pays où les deux bateaux, l'Etoile, une jolie flute d'origine hollandaise et la frégate la Boudeuse iront. Il est accompagné de son très jeune et fidèle valet, Jean Baret. Tous deux sont affectés à bord de l'Etoile où l'on compte déjà cent vingt sept hommes, et un volume considérable de victuailles, de sacs de farine, de riz, de légumes secs, des barils d'oignons, de fromage, de sucre. Et une quantité incroyable de biscuits de marins, cette sorte de pain de conserve faite de farine et d'eau, mais sans levure ni sel. Sans oublier des poules et des moutons ainsi que d'énormes caisses de chandelles et de lanternes.
Jean a 27 ans. Il est de petite taille, courte et grosse, de larges fesses, une poitrine élevée, une petite tête ronde, un visage garni de rousseur, une voix tendre et claire, une adroite dextérité et délicatesse. Cela faisait de cet homme le portrait d'une fille assez laide et assez mal faite.
En fait, derrière Jean Baret, se dissimulait Jeanne Barret, la maitresse depuis cinq ans du docteur. Une femme à bord d'un navire de la marine royale ! Mais cela est interdit depuis la publication d'une ordonnance du 15 avril 1689. Si les hommes ne s'aperçurent de rien, le secret de Jeanne fut découvert bien plus tard par une petite indienne d'à peine douze ans, aux seins à peine naissants et au regard franc. Elles devinrent de grandes amies et complices. Par mesure disciplinaire mais surtout par prudence, le couple est débarqué à Port-Louis le huit novembre 1768 chargé de toutes les collections réunies. Ils ont pour mission d'examiner l'histoire naturelle des îles de Bourbon, Madagascar, et de l'Île de France. Vraiment un vaste domaine, sur une bien grande surface ! D'autant que les moyens utilisables sont fort limités.
Le docteur, meurt à l'âge de quarante six ans le treize mars 1773. Pour subvenir à ses besoins Jeanne Barret ouvre à Port-Louis un cabaret-billard. Mais, elle sert de l'alcool le dimanche, et ses clients sont ivres à l'heure de la messe !... Elle doit cesser ses activités. En mai 1774, elle épouse Jean Dubernat, un militaire de la marine. Le couple va rentrer en métropole deux ans après avec dans leurs bagages une précieuse collection de plus cinq milles plantes.
Commerson était un grand savant, on lui doit la découverte au Brésil d'une très jolie plante à qui l'on donnera le nom de bougainvillée en hommage à Bougainville, le chef de l'expédition scientifique. Inutile de dire que le bougainvillier est maintenant fort répandu. Il permet de constituer des haies denses et fleuries, la bougainvillée, mais aussi l'exploration du Piton de la Fournaise. Un cratère, à l'altitude de 2320 mètres porte son nom, ainsi qu'une école à Sainte-Clotilde.
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(1) Pour une version romancée, se reporter au livre de la Canadienne Monique Pariseau paru en 2010 "Jeanne Baret" Première femme ayant accompli, au XVIII° siècle, LE TOUR DU MONDE déguisée en homme. (titre repris in extenso)
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